JEAN-BAPTISTE CAILLON



La famille Caillon n'était pas originaire de l'Ain, mais de Paris. Elle se réfugia à Châtillon les Dombes pendant la Révolution.
Jean-Baptiste, né en 1783, passa donc son enfance à la frontière de la Bresse et de la Dombes. Il fit ses études à Lyon, et est licencié es lettres à 19 ans. Il fit carrière pendant près de vingt ans dans l'enseignement, en différents lieux de France ( Orléans, Blois, Sancerre ) puis dans les finances à la Banque de France comme comptable ( 1827 à 1832 ), avant de revenir à Châtillon où il est élu maire en 1838. De 1848 à 1852, il siège au Conseil Général de l'Ain.
Il mourut en mai 1864 en sa bonne ville de Châtillon.

- Le Val de la Chalaronne (1849)
- Stances à l'occasion de l'érection d'un monument à saint Vincent-de-Paul, curé de Châtillon-les-Dombes en 1617 (1856)
- Le Métier des champs, opuscule géorgique dédié au comité agricole de Trévoux (1857)
- Le Sursum Corda du laboureur (1858)
- Le Journalier des Champs (1858)
- La Ferme (1859)
- Un Roi boit en Dombes ou Victor et Thérèse (1860)
- La Dombes transformée (1863)




Qu'elle est belle notre contrée !
Oh ! Qu'elle est magnifique à voir
Jamais elle ne s'est montrée
Riche d'un plus brillant espoir.
Voyez comme la terre est verte !
Gracieux en est le décor :
De fleurs le printemps l'a couverte,
L'été devra la vêtir d'or.


(Sursum Corda du laboureur)



Tes mains ne tiennent point seulement la quenouille ;
Ton front le plus souvent d'âcres sueurs se mouille.
Qu'un vent impétueux de ses noirs tourbillons
Menace le trésor des prés ou des sillons,
Tu concours à sauver les richesses nouvelles :
Tu rejoins les andains, tu lèves les javelles ;
Ton râteau diligent ramène autour des chars
Ou l'herbe vagabonde ou les épis épars ;
Tu vas, tu viens, tu cours ; justement alarmée,
Tu stimules l'ardeur, et de la fourche armée,
Lorsque le moment presse, on te voit au besoin
Tendre la gerbe lourde ou la masse de foin.
Qu'au jour le plus brûlant, à l'heure la plus rude,
Un batteur, sur le sol tombé de lassitude,
Laisse là le fléau, tu le reprends en main,
Et des cosses de blé tu fais jaillir le grain.
Ton second, admirant lui-même ta prestesse,
De tes coups cadencés reconnaît le justesse ;
Le bras de forgeron n'est pas plus régulier
Quand il bat sur l'enclume et qu'il dompte l'acier.

Ce n'est point tout encore, et plus d'une journée
Est pénible pour toi dans le cours de l'année :
Dès que le doux printemps vient de son souffle ami
Réveiller le terrain qui s'était endormi,
Donner à chaque grain cette force inconnue
Qui fait de chaque gerbe une tige menue,
Tu vas, le dos courbé, dans les champs de Cérès,
De l'herbe parasite expurger les guérets,
Surcharger d'un fardeau, pour une longue route,
Ta tête que le poids affaisserait sans doute,
Si tu n'avais l'espoir, qu'aisément je conçois,
De faire ruisseler plus de lait sous tes doigts ;
Et lorsque le terrain, après des jours de pluie,
Sous les feux du soleil s'affermit et s'essuie,
Ne promènes-tu pas, du grand matin au soir,
Dans les champs emblavés la lame du sarcloir ?
C'est vaincu par ton fer qu'un sol qui se révolte
Est contraint de donner encore une récolte.
Le colza, la navette enbaument ton voisin ;
Le chanvre, le maïs, le blé du sarrazin
Epaississent leurs rangs ; la plante dont tu cueilles
Pour nourrir ton bétail la racine et les feuilles,
La truffe parmentière, aliment savoureux,
Ne doivent leur succès qu'à ton bras vigoureux.



(la paysanne, dans "Le Métier des champs")


Son front, quand l'aube reposée
Donne sa première lueur,
A chaque goutte de rosée
Mêle une goutte de sueur.
La terre, à sa herse docile,
Le sein profondément ouvert,
Promet une moisson facile
Au sillon qu'il a recouvert.


(le laboureur, dans "Le Métier des champs")



Mais voici les troupeaux qui reviennent des champs ;
De leurs petits gardiens je distingue les chants :
Ce ne sont point les chants des bergers de Virgile.
Enfants de bon vouloir, aidés d'un chien agile,
Ils chassent devant eux le peuple du bercail
Que la mère attendait sous l'abri du portail.
Chaussés du blanc bouleau, le bissac sur l'épaule,
En guise de houlette ils agitent leur gaule
Fiers du commandement qu'ils viennent d'exercer,
Et dès l'aube du jour prêts à recommencer,
Ils comprennent déjà le prix de leurs services.
Pour les obtenir d'eux point de ces durs sévices,
Point de ces mots grossiers qui, manquant leur effet,
Abrutissent l'enfant qu'on veut rendre parfait.


(l'enfant de la campagne, dans "Le Métier des champs")




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