Charles Juliet né à Jujurieux en
1934, vit à Lyon. Il est l'auteur de poèmes, de textes pour le théâtre, de
récits autobiographiques (L'Année de l'éveil), d'un Journal et d'écrits
sur les artistes. Son oeuvre est considérée comme l'une des plus
singulières de notre temps.
À travers ses essais, ses romans, ses
nouvelles, ses poèmes ou son Oeuvre théâtrale, Charles Juliet vit
l'écriture comme une longue approche de soi. En familier des mystiques
occidentaux et orientaux, il puise l'énergie de sa création dans cette
patiente et exigeante exploration intérieure. Ce voyage l'a conduit vers
une seconde naissance, sans rattachement aucun à une religion. Il nous
livre la profondeur de cette quête intime. Et chacun s'étonnera de
s'en sentir si proche. Pour peu qu'il ait commencé l'expédition.
Il est des passés qui s'exorcisent. Celui de
Charles Juliet est de ceux-là. Non pas les souvenirs des premiers mois de
la vie, ceux qui pourtant furent les plus dramatiques puisqu'ils
l'arrachèrent à sa mère. L'écrivain, pas encore prêt, ne le fera que
beaucoup plus tard dans Lambeaux.
Mais ceux des longues années d'apprentissage dans l'École militaire
d'Aix-en-Provence. D'abord terribles par la séparation (une fois de plus)
de sa famille adoptive, la solitude de sa différence (sa sensibilité, son
regard, ses silences le séparent des autres), le froid, la faim. Puis
agrémentés, peu à peu, de son amitié avec le Capitaine que tous admirent,
de sa première passion surtout pour cette femme qui le jette violemment
dans le monde adulte.
Pour qui a lu le Journal de Charles Juliet, L'Année de
l'éveil est une mine d'or qui permet de comprendre la profondeur d'une
personnalité rare. Mais ce récit autobiographique s'adresse d'abord à tous
tant il rend de façon universelle les turbulences et fulgurances de
l'adolescence. Grand Prix des lectrices de Elle en 1989, il fut
porté à l'écran la même année par Gérard Corbiau. ( Laure Anciel, site de http://www.amazon.fr )
Lambeaux marque un tournant essentiel dans
l'écriture de Charles Juliet. Il le libère et le fera ensuite passer de la
poésie et des journaux à la fiction. L'auteur y vide pour la première fois
sa mémoire, dénoue le noeud de son malaise et l'origine de son
écriture : la mort de sa mère alors qu'il n'a que quelques mois. Par
des phrases lentes, granitiques, il accède aux racines tranchées, extirpe
sa mère du rien en lui donnant la parole.
La deuxième partie dit l'autre mère. Celle qui l'a recueilli. La
"toute-donnée" qui ne se plaint pas et parle peu. Charles Juliet lui prête
également ses mots. Il fouille, met à jour la pensée de cette femme, ce
"chef-d'oeuvre d'humanité" qui l'a sauvé de la folie ou du suicide.
Derrière ce double portrait, Charles Juliet relate aussi la lente
gestation de son être, par-delà les peurs, les blessures, les aridités.
Par-delà la culpabilité. Jusqu'à cet instant où le brouillard se dissipe,
où une force tranquille s'installe et lui permet à nouveau d'adhérer à la
vie. ( Laure Anciel )
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