JOSEPH MANDRILLON



Joseph Mandrillon voit le jour à Bourg en Bresse en 1743. Il mourra sur l'échafaud en 1794. Il fit de nombreux voyages en Hollande et en Amérique. Chacun de ses périples donna lieu à une relation écrite :

- Histoire de la Révolution de Hollande (1787)
- Le Voyageur Américain (1783)
- Le Spectateur américain (1783)
- Fragments de littérature et de politique (1788)
- Voyage à Berlin (1788)
- Voeux patriotiques (1789)






Française, femmes aimables, femmes à qui le dieu du goût prodigue par préférence le don de plaire et de charmer, Françaises, qui avez un ascendant irrésistible sur nos esprits comme sur nos cœurs, je vous invoque au nom de la nation entière. Jamais vous n'eûtes une si belle occasion de bien mériter de la patrie. Avec les charmes et la beauté, vous possédez, au degré le plus éminent, l'esprit de conciliation. La raison, embellie en passant par vos bouches, subjugue nécessairement.

Venez au secours de vos époux, de vos amants, de vos amis : sans vous, il est à craindre qu'ils ne fassent céder l'intérêt général à tant d'intérêts divers ; sans vous, le grand œuvre qu'ils ont entrepris sera imparfait, et peut-être un malheur de plus. Venez, vous serez éloquentes, c'est le privilège des grâces. En plaidant la cause de l'égalité, vous plaiderez celle de la nation, et vous aurez la gloire d'avoir accéléré son bonheur.

Vous avez le plus grand intérêt à sa régénération : depuis des siècles les Françaises ne voyoient à leurs pieds que des esclaves ; elles n'y verront plus que des hommes libres ; leur hommage seul honore la beauté.

Le roi, la nation, ont reconnu leurs vrais intérêts : il n'est aucune sorte de gloire pour un monarque, s'il règne sur un peuple avili… Hâtez-vous donc par vos sages conseils de dissiper le nuage affreux qui s'élève sur le sanctuaire de la nation. Répandez dans l'âme des députés cet esprit de modération, de douceur, de confiance et d'unanimité qui doit les animer tous. Inspirez à toutes les classes de citoyens des principes d'ordre et de paix…

Que les abus soient détruits ; que chacun remplisse l'emploi auquel ses talens et ses vertus l'appellent : en un mot, que l'Etat soit bien gouverné ; alors les hommages que nous vous rendrons seront dignes de vous. Vous nous verrez déposer à vos pieds les trophées de la liberté, et vous vous applaudirez de ce que vous aurez fait pour elle…

Sans la concorde, sans l'esprit de paix, le bonheur ne peut pas plus résider dans les Etats que dans les familles. Les Français ne forment-ils pas une seule et même famille, indépendante de tout, hors de ses devoirs ? Usez donc de tout votre empire sur vos époux et vos enfans, pour qu'ils se pénètrent bien de cette grande vérité. Faites que l'on pense ainsi d'un bout du royaume à l'autre ; et l'Assemblée nationale, au lieu de scandaliser l'Europe par ses dissensions, offrira le spectacle aussi touchant que magnifique d'une assemblée de frères, d'amis, enfin de véritables Français. C'est ainsi que vous mériterez la reconnoissance publique.

(Vœux patriotiques , 1789, brochure de 36 pages)




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