Claude Favre de VAUGELAS



Claude Favre naît le 5 janvier 1585. Il est le second fils du président Favre. Vaugelas vient du nom d'une maison que ce dernier avait fait édifier à Meximieux, dans une propriété de son beau père. Le jeune Claude vit dans cette maison, mais aussi à Bourg en Bresse et Chambéry. Dès douze ans, il rencontre François de Sales, un ami de son père, puis part en Italie vers quinze ans. Au cours de ce voyage, il fait la rencontre de Bachet de Méziriac. Et apprend l'Italien. En 1607, son père le fait agréer comme officier domestique de la maison d'Henri de Savoie... en 1615, il est interpr^te du duc de Mayenne au cours d'une mission en Espagne... En 1618, son père lui fait avoir une pension, suite au mariage du prince héritier de Savoie Victor-Amédée et de la fille d'Hendi IV. En 1624, il hérite de la seigneurie de Pérouges, à la mort de son père, mais ne revient pas pour autant au pays. On le retrouve en effet chambellan de Gaston d'Orléans, et il restera fidèle à l'homme quand celui-ci sera en disgrâce. Il meut à Paris en 1650. Timide et réservé, il n'avait pu accéder sur le devant de la scène, et encore moins su faire fructifier ses biens. Il dut même aliéner sa seigneurie de Pérouges, puis celle de Vaugelas.
Et c'est à Nicolas Faret qu'il doit son entrée à l'Académie Française. Il lui fera honneur, comme ardent défenseur de la langue française.



Vaugelas s'essaya modestement à la poésie, dans sa jeunesse. Il ne reste que peu de choses de ses poèmes. Il dédaigna vite ces exercices, et c'est peut-être dommage, quand on sait comment il réglementa notre langue, ouvrant la voie à bien d'autres après lui.


Empêché d'un empêchement
Dont le nom n'est pas fort honnête
Je n'ai pu d'un seul compliment
Honorer au moins votre quête.
Pour en obtenir le pardon,
Vous direz que je fais un don
Aussi honteux que mon remède ;
Mais rien ne paroît précieux
Auprès de l'ange qui possède
Toutes les richesses des cieux.

(à la princesse Marie, future reine de Pologne, pour répondre à une quête de charité)




<< Le grand dessein de Vaugelas était de doter la langue française de l'instrument qui lui manquait encore et qui devait être utilisé par tous les grands classiques. Plusieurs, avant lui, avaient compris cette nécessité : parmi eux les écrivains de la Pléiade, et en particulier du Bellay dans sa "Défense et llustration de la Langue Française". Pour ceux-là, il s'agissait surtout de trouver un langage suffisamment riche et expressif, capable de rivaliser avec les illustres modèles de la Grèce et de Rome. Puis Malherbe vint, qui souhaita corriger les excès et les désordres, mais avec un souci d'épuration sans doute excessif.

Le but de Vaugelas fut de créer un mode d'expression à la fois claire et noble, conforme au génie de la nation.

Ses moyens : ne rien imposer de façon doctrinale, mais énoncer de simples remarques dictées par l'observation. Et cette observation concerne l'usage, c'est-à-dire "la façon de parler de la plus saine partie de la cour, conformément à la façon d'écrire de la plus saine partie des auteurs du temps".

Vaugelas tient ainsi à apparaître comme un témoin, les yeux ouverts sur son temps, formé par la fréquentation des livres, des cercles savants et des cours, et par les voyages. Et "c'est bien avec une enquête sur les mots et avec l'expérience sincère et profonde du témoignage que la sagesse commence. Et peut-être qu'elle finit.' (V.L. Saulnier).

Ce sera en humaniste qu'il considérera la grammaire, avec pour premier souci que la langue devienne un élément de la vie sociale : parler pour se faire comprendre d'autrui. D'où ses efforts contre le laisser-aller et l'anarchie de la prononciaation, contre le flottement dans l'orthographe et la conjugaison, contre les incertitudes de la syntaxe et en particulier des accords. En conséquence le peuple ne peut jamais être considéré comme un arbitre du bel usage, et de ce fait Vaugelas donne sans doute trop d'importance à la cour, mais, comme le remarque V.L. Saulnier, "Autorité, raison, hiérarchie, communauté, telles seraient les principales exigences, ou les principaux respects, de cet Homme classique".

Sans doute, depuis, la linguistique a évolué et bien des rigueurs se sont saaouplies, mais l'essentiel demeure. Du reste, Vaugelas, en bon humaniste qu'il était, savait que l'humanité ne pouvait se trouver qu'en perpétuelle mutation, et il ne jugeait pas ses remarques destinées à rester valables plus de vingt-cinq ou trente ans. Cependant, en dépit de cette modestie inhérente à son caractère, la plupart de ses recommandations ont eu, pour ainsi dire, force de loi...>>
(Paul Guichard : Histoire littéraire des Pays de l'Ain , tome 1 page280, Ed. Bonavitacola, 1994)




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